Le nageur d’Arral

Louis Grall

Né à Brest d’un père officier de marine et d’une mère sage-femme, Louis Grall a passé quasiment toute sa vie dans sa ville natale. Il a publié de manière épisodique en breton et en français dans diverses revues de poésie ou chez des éditeurs régionaux des courts récits, contes et novellas.

Résumé

Un curieux petit roman , un peu plus de 110 pages ; curieux par son écho avec l’actualité, alors qu’une « opération spéciale » lancée en février dernier par la Russie a rallumé la guerre en Europe, Le nageur d’Arral est l’histoire d’une autre opération spéciale qui n’a pas eu lieu le 12 Novembre 1961, à Brest, contre des navires de la Marine nationale. Le commando Anton Nazarbaïev en a décidé autrement. Etrange affaire révélée au narrateur du récit par Frère Luc, moine à l’Abbaye de Landévennec. Thriller,  roman d’espionnage sur fond de guerre froide ?  Louis Grall donne une tout autre direction à son roman. Le narrateur a été invité par Frère Luc  afin qu’il prenne connaissance de l’ « affaire » du « Nageur » et en fasse un livre. Belle aubaine pour l’ écrivain ? Mieux, une plongée dans les insondables mystères du cœur humain.

12 novembre 1961 : un chalutier « met à l’eau » un nageur à cinq milles au nord-ouest d’Ouessant. Dans une mer démontée, il va, fort de sa stature  de commando de l’école de Leningrad, de ses convictions idéologiques, de la préparation millimétrée de sa mission contre la flotte basée à Brest. Il va dans la tempête et approche  la côte bretonne. Bientôt les paysages s’animent : un phare, lumières des maisons au petit matin, fragrances douces de la terre qui le font se ressouvenir de son enfance sur les bords de la mer d’Arral dans la désormais lointaine URSS. Est-ce pourquoi Anton se défait des charges explosives qu’il porte sur lui ? Il ne le sait, mais il le fait et il va où la mer et sa nage enfin apaisée le portent : au pied de l’Abbaye de Landévennec. Commando de fond en comble, Anton organise sa transformation en vagabond. Seuls l’auront vu un saumon, un renard, une buse… Mais ils n’auront rien dit, pas plus que les moines de Landévennec qui lui offriront l’asile monastique.

Le roman de Louis Grall enchante le lecteur par la profondeur et la simplicité d’une histoire d’hommes que tout oppose,  par la puissance et la beauté d’une écriture poétique envoûtante. La lecture s’en fait, douce, poignante au fil des évocations de la nature, de ses parfums, de ses bruits feutrés par les murs de l’Abbaye ; au gré de la lenteur des jours et de l’apprivoisement de chacun par chacun, les moines et le « tueur » réfugié et accepté ; au cours d’une réflexion sur le bien et le mal, le temps qu’il fait et celui qui passe, l’amour et la vie et la mort. Un roman comme un hymne à l’humilité, comme un moment de grâce et de recueillement, comme une invitation à l’apaisement et au bonheur rendu possible…

 

Yannick Pelletier
Membre du jury du prix de la ville de Carhaix