Interprète : Annie Ebrel

16 titres composés autour des poèmes d’Anjela Duval

Avec Daravan Souvanna à la basse, Clément Dallot aux claviers et Ronan Pellen au cistre et au violoncelle.

Production : Coop Breizh, 2021

Née en 1969, Annie Ebrel est l’une des meilleures représentantes actuelles du chant en langue bretonne et à n’en pas douter l’une des plus belles voix de Bretagne. Elle fait rayonner sa langue maternelle et le patrimoine écrit et oral breton dans de nombreux pays. Elle aime utiliser la matière du chant traditionnel pour aller à la rencontre d’autres genres musicaux, d’autres artistes et cultures, ouverte à toutes les sensibilités, forte de son ancrage dans le chant a capella, mélodies ou chant à danser (musiques électriques ou jazz comme avec Riccardo Del Fra, One Shot, Celtic Procession…).

Elle va encore plus loin dans cette voie en sublimant cette fois-ci l’œuvre, immense et précieuse, d’Anjela Duval, essentiellement des poèmes et des lettres issues d’une correspondance abondante. C’est donc un album de chant, des compositions originales où la musique est au service des mots, et quelques textes dits avec une musique illustrative. Un écrin musical très actuel, chaleureux, dans une veine new folk.

Ça a été difficile à mettre en musique, car la poésie d’Anjela Duval n’est pas versifiée (vers libres). Les mélodies répétitives ne fonctionnent pas ici.

Annie Ebrel

Anjela Duval, Costarmoricaine qui vécut de 1905 à 1981, est l’une des rares femmes à s’être fait un nom au XXe siècle grâce à un travail d’écriture, en Bretagne, et même en Europe ! C’était une paysanne qui écrivait aussitôt qu’elle n’était pas accaparée par le labeur de la ferme ! Insuffisamment reconnue par ses pairs et ses contemporains, c’est aujourd’hui une figure. Elle portait déjà un regard sensible et critique en évoquant la place des femmes, la nature. Des propos sérieux mais pas nécessairement tristes. C’est une artiste qui sait être espiègle, un peu moqueuse.

Les rues et écoles portant son nom témoignent de l’importance de son œuvre pour la culture et la poésie bretonnes. Ses textes continuent d’inspirer ou simplement d’être repris par des artistes d’aujourd’hui : An alc’hwez aour (La Clé d’or) interprété par Gwennyn dans son album En tu all, ou Karantez vro (L’Amour du pays), mis en musique et interprété par Véronique Autret et repris par Nolwenn Leroy dans son album Bretonne. On retrouve plusieurs de ses poèmes dans l’album Eusa de Yann Tiersen, sorti en 2016.

Originaire du Vieux-Marché, dans le Trégor rural, comme Annie Ebrel, dont la famille est originaire de ce secteur, et eux aussi paysans. Une affinité évidente avec cette femme de la campagne qui défend sa vision de l’agriculture, et tire déjà la sonnette d’alarme à l’époque où ce pan de la société et de l’économie est bouleversé par sa révolution technique. Anjela Duval met en garde le monde paysan : ne vous lancez pas à corps perdu dans le productivisme ! Ne détruisez pas les talus !

Anjela Duval est devenue populaire dans les années 1970 grâce à l’émission de télévision “Les Conteurs”, d’André Voisin, directeur des programmes de l’ORTF. Elle est devenue une figure et un repère autant pour les bretonnants qui cherchaient leur identité que pour les agriculteurs de France voulant un retour aux sources dans le travail. Ses mots ont fait mouche. Si elle n’a pas fait d’études, elle écrivait et parlait en français aussi aisément qu’en breton, et était ainsi armée pour défendre ses idées, leur donner une portée, et se tenir informée de l’actualité internationale. Le titre Lagad an Heol évoque d’ailleurs l’assassinat de Kennedy et d’autres évènements retentissants ; c’est un poème puissant et rageur qui décrit les événements tragiques que voit le soleil dans sa course autour du monde.

Dimanche 31 octobre à partir de 14h30
Salle « Le Klub »

Rencontre avec Annie Ebrel à l’occasion de la sortie de son nouvel album Lellig.