Des préjugés tenaces et des rumeurs tiennent la poésie pour un genre lointain, difficile, inaccessible. On la juge parfois désuète, démodée, d’un autre temps. Depuis plusieurs décennies, ses fossoyeurs pronostiquent régulièrement sa disparition. Or elle existe toujours, plus vivante que jamais.

Bien qu’elle ne représente que 4% du chiffre d’affaires du marché de la littérature en France, le regain d’intérêt pour la poésie est bien réel. Il existe de plus en plus de manifestations de poésie : lectures, soirées, récitals, rencontres avec des auteurs, expositions, salons et festivals. L’intérêt pour la poésie va bien au-delà du cercle restreint des initiés. Modeste, silencieuse, voire souterraine, la poésie trouve sa source dans la réalité de l’expérience humaine. En faisant appel à l’intime enfoui au plus profond de soi, elle dit l’infini des connaissances qui s’ouvrent à nos sens et à notre intelligence. Elle explore l’intelligence sensible que nous ne parviendrons jamais à comprendre totalement.

Chacun peut ainsi se laisser subjuguer par la puissance et le secret de la parole poétique, car ses approches sont multiples. On peut trouver un plaisir simple et immédiat dans les sonorités et le rythme des mots qui éveillent les sens. À d’autres moments, on recherchera un écho à sa propre expérience, une compréhension de ce qui se vit et se pense autour de nous.

Parmi les éditeurs accueillis à Carhaix, ceux de poésie sont bien présents et saisissent l’occasion de se faire mieux connaître du public. Voici quelques-uns d’entre eux, habitués du festival ou nouveaux venus :

  • La Part Commune, après le décès de son responsable Yves Landrein en 2012, continue ses activités. Parmi les auteurs du catalogue : Nicole Laurent-Catrice, Jean-Pierre Boulic, Alain Kervern. Parmi les projets en cours, la publication de la correspondance de Georges Perros.
  • Les Hauts-Fonds, créées à Brest par le poète Alain Le Saux en 2008, publient poésie, textes philosophiques et pamphlets, dans une maquette inventive et agréable. Auteurs phares : Guy Cabanel, Paol Keineg et Alice Massénat.
  • L’Autre Rive publie, dans un format à l’italienne mis en page avec élégance, recueils, ouvrages collectifs et la collection bilingue français-anglais « La Frange Atlantique ». Au catalogue : Ève Lerner, Alain Jégou, Alexis Gloaguen, Guénane, Jacqueline Saint-Jean, Henri Droguet, Gérard le Gouic.
  • Les Éditions Sauvages, créées en 2007, ont publié 21 ouvrages dans trois collections, où auteurs et artistes collaborent. Les auteurs (Marc Bernol, Louis Bertholom, Marie-Josée Christien, Bruno Geneste, Patrice Perron, Paul Quéré (1931-1993), Guy Allix, Isabelle Moign…) viennent de la sphère de la revue Spered Gouez. L’association organise « les rendez-vous de Max », lectures-rencontres mensuelles, Chez Max, ancienne maison d’enfance de Max Jacob à Quimper.
  • Les éditions de la Lune bleue créées en 2010 par la poète Lydia Padellec viennent de s’installer à Port-Louis et éditent artisanalement des livres d’artistes. Parmi les auteurs : Lionel Ray, Gérard Noiret et bientôt Bruno Geneste et Marie-Josée Christien.
  • Ligne de Légende fondée par Serg Gicquel dans sa galerie de Spézet édite de beaux et originaux livres d’artistes, avec des matériaux précieux et rares.
  • Les Armoricaines, microéditions fondées par Josette David, réalisent d’astucieux livres accordéons illustrés (dont ceux d’Olivier Cousin, Pierre Livory et Patrice Perron) et des livres pour enfants.
  • Vagamundo, dirigé avec dynamisme par Cristina de Melo, publie des ouvrages d’auteurs francophones traduits en portugais (Philippe Jaccottet) et d’auteurs lusophones traduits en français (Nuno Judice) et des recueils singuliers (Varechs de Jean-François Bonadona). Les éditions organisent aussi le Salon du Livre Cosmopolite de Nizon et des rencontres-lectures.

Certains éditeurs généralistes (Apogée, Coop Breizh) et quelques revues, Littérales par exemple, éditent également des ouvrages de poésie.

Marie-Josée Christien